Cette semaine je vous parle notamment d’effet Streisand, d’application iranienne, d’intelligence artificielle et de jeux vidéo.
Les brèves dont on ne parlera (presque) pas :
Internet peut être profondément espiègle avec les “fails”. Récemment, cela se confirme avec le tweet de Tim Cook, le PDG d’Apple, qui félicitait l’équipe victorieuse du Super Bowl avec une photo particulièrement ratée. Qu’elle soit mal cadrée et ne présente aucun intérêt si ce n’est un gazon et une foule au fond c’est une chose, mais c’est surtout la qualité technique qui a fait jaser sur le réseau social.
Cette photographie aurait presque pu passer inaperçue dans le gigantesque flux de tweets du Super Bowl si elle n’avait pas été prise depuis le dernier flagship de la marque : l’iPhone 6. Avec un prix minimum de 600 dollars et un argumentaire marketing très focalisé sur les capacités techniques du téléphone, autant dire que cette photo fait mal à la communication d’Apple. Certains internautes ne se sont d’ailleurs pas gênés de parodier la bourde de Tim Cook :
Au bout d’une heure Tim Cook répond finalement en diffusant une nouvelle photo bien plus nette. Est-ce la fin de l’histoire pour autant ? La photo a depuis été supprimée du compte de l’intéressé. Surtout, les Trolls (terme d’internet pour qualifier les moqueurs), qui avaient directement répondu au tweet ont été bloqués du compte de Tim Cook. Décidément Apple n’aime pas les Buzz qu’elle n’a pas pensés de A à Z. Reste que la photo est désormais sur Internet et il sera pratiquement impossible pour la firme à la pomme de faire disparaître toute trace de cette bêtise. Morale de l’histoire, si vous devez communiquer sur les réseaux sociaux utilisez un samsung prenez le temps de vérifier votre photo avant de la poster.
On continue les brèves de cette revue de presse avec un autre effet Streisand. Pour mémoire l’effet Streisand correspond à un buzz qui aurait très probablement pu être évité si le requérant n’avait pas exigé qu’une photo soit supprimée. Le terme provient du bruit médiatique provoqué par la plainte de Barbra Streisand en 2003 suite à une photo où l’on pouvait voir sa villa. Craignant pour son image, elle exige par le biais d’un procès que la photo soit retirée. Sauf qu’à l’heure d’Internet, la chanteuse n’avait pas prévu que de nombreux médias relaient l’information avec la photo en question comme support visuel. Cette tentative de censure déclenche aussi une réaction spontanée de milliers d’internautes à travers la planète : ils publient, conservent, parodient la photo comme un doigt d’honneur levé contre une atteinte à la liberté d’expression sur Internet.
Dans le cas du selfie de Jean-Marie Le Pen pris alors qu’il dormait, le processus est identique. La volonté de l’ancien président du FN de censurer une image dont la portée allait être limitée dans l’espace et le temps déclenche le résultat inverse. En effet, la photo fut relayée une bonne partie du mois de décembre sur des médias français mais aussi étrangers , et elle l’est encore aujourd’hui à chaque étape du procès. Un cercle vicieux ingérable en somme.
Dans le cadre d’une procédure de référé, Jean-Marie Le Pen a réussi à faire reconnaître qu’un selfie pris à son insu, alors qu’il dormait, constituait une atteinte à son droit à l’image. Cependant, alors qu’il réclamait 50 000 euros de dommages et intérêts pour le préjudice moral subi, le Tribunal de Grande Instance (TGI) de Paris a jugé que le cliché n’était « ni dégradant, ni malveillant ». Par conséquent, l’accusé ne devrait payer qu’un euro symbolique pour son acte, en plus des 3 000 € de frais de justice à rembourser. Le TGI demande aussi à Brahim Zaibat de supprimer le selfie dans les 48 heures au risque de devoir payer une amende de 1 000 euros à chaque jour de retard.
L’avocat du condamné a annoncé vouloir faire appel de cette décision. Cela permettra aux médias de diffuser une fois encore la photographie litigieuse (leur droit à l’information leur permet justement cela) mais cela permettra aussi de ranimer les débat sur la liberté d’expression et ses limites avec d’autres droits à défendre comme l’ordre public, le respect d’autrui ou comme ici le droit à l’image.
Comment faire pour éviter la police de la vertu iranienne, chargée de veiller au bon respect des codes vestimentaires dans les grandes villes du pays ? Un groupe de programmeurs iraniens qui en a assez d’assister aux humiliations publiques de cette police des mœurs, a décidé de régler le problème par le biais d’une application : Gershad. Ils expliquent d’ailleurs leurs motivations sur leur site Internet :
“Selon le chef adjoint de la police, en année 1392 [entre mars 2013 et mars 2014], 3 millions de personnes ont reçu des “avertissements” de la part de la police des mœurs. Qui ne connaît pas l’humiliation et l’irrespect qu’impliquent ces avertissements ? Pourquoi devrions-nous être humiliés pour notre droit le plus évident à choisir nos propres vêtements ? La police devrait être la garante de la sécurité des citoyens et non pas un facteur de la terreur. Furieux de tant d’injustice, nous avons décidé de trouver une solution pour résister et récupérer une partie de nos libertés de manière pacifiste et avec le moins de risques.”
Grâce à Gershad – un mot-valise composé de “gerdesh kon”, “contourne-le” dans le langage des jeunes Iraniens, et d'”ershad”, “guidance” en anglais ou “bonnes pratiques”, les utilisateurs peuvent enfin connaître l’emplacement en temps réel de la police et ainsi être en mesure de la contourner. L’application fonctionne sur le même principe que Waze ou Coyote, elle est collaborative. Concrètement, chaque automobiliste peut prévenir de la présence d’une patrouille de police et tous les autres connectés à l’application seront avertis immédiatement.
La création et le développement de Gershad, cette application originale, confirme deux points:
1- Les Iraniens, particulièrement les jeunes, sont férus d’informatique, très connectés à Internet et aux réseaux sociaux. Ils sont en même temps tout à fait créatifs et savent utiliser les outils digitaux pour développer des solutions que les autorités publiques auront du mal à interdire. Il suffit de se souvenir de leur utilisation ingénieuse des réseaux sociaux lors des grandes manifestations de 2009 pour se rassembler et prévenir le monde entier des événements sur place.
2- Ces mêmes jeunes iraniens, qui avaient manifesté en 2009 lors de la “Révolution verte”, acceptent de moins en moins les contraintes, notamment vestimentaires, imposées par le pouvoir depuis 37 ans. Et ce, même si elles se sont assouplies depuis quelques années, notamment depuis l’élection de Hassan Rohani comme vous pouvez le voir dans cette vidéo :
Finalement, les jeunes iraniens veulent simplement vivre leur vie, comme tous les jeunes du monde. Mais comme la voie politique va prendre du temps, en attendant un véritable assouplissement général ils contournent le système en espérant ne pas se faire coincer.
Alors que les annonceurs s’appuient de plus en plus sur la vidéo pour leurs campagnes publicitaires sur Facebook, le réseau social ajoute désormais automatiquement des sous-titres afin d’accroître l’efficacité des spots insérés dans les fils d’actualités. D’abord lancé aux Etats-Unis et au Canada, le service devrait être proposé au reste du monde dans le courant de l’année.
En effet, même si les vidéos sont souvent regardées du coin de l’oeil par les utilisateurs, le plus souvent le son est coupé de base afin de ne pas agresser l’internaute à chaque chargement de la page d’accueil. Une autre raison des sous-titres est que les utilisateurs se baladent sur le réseau social au travail ou en cours : la discrétion est donc de rigueur. Or face à l’absence de son, de nombreuses publicités perdent tout intérêt, et une grande majorité d’entre elles ne sont pas visionnées jusqu’au bout. D’ailleurs, d’après une étude Nielsen, 47 % de ce que l’on retient provient même des 3 premières secondes d’une vidéo.
Pour les annonceurs, cela signifie que l’image est le seul vecteur de communication qui touche réellement tous les internautes et surtout qu’il faut au plus vite en venir au fait. Selon Facebook, la technique la plus simple pour y parvenir est d’ajouter des sous-titres car cela suffirait en moyenne à augmenter le temps de visionnage de 12%.
Avec 100 millions d’heures d’attention quotidienne sur l’ensemble du service Facebook, cette annonce participe évidemment d’une volonté de choyer ses annonceurs afin qu’ils continuent de privilégier le réseau aux 1.5 milliards d’utilisateurs.
Tout le monde connait les Captcha, ces tests d’identification sur Internet chargés de vérifier que vous êtes bien un humain. Inventés au début des années 2000 à l’université Carnegie-Mellon de Pittsburgh (Pennsylvanie) CAPTCHA est l’accronyme de Completely Automated Public Turing test to tell Computers and Humans Apart, soit « test de Turing complètement automatique et public pour distinguer les ordinateurs des humains ».
La référence au test de Turing est donc explicite et ce n’est pas la première fois que Toile de Fond vous parle de ce célèbre test à travers différents domaines comme la peinture ou la poésie. Cependant, si le test de Turing consiste à déterminer si une Intelligence Artificielle (IA) est suffisamment “intelligente” pour se faire passer pour un humain, ici l’objectif est exactement le contraire. En effet, le Captcha vérifie que la demande provient bien d’un humain en le forçant à se montrer plus intelligent que la machine.
Concrètement, on demandait à l’internaute d’écrire les mots qu’il voyait. Ces mots (ou ces chiffres) étaient généralement barrés, déformés voire même cachés derrière des gribouillis afin de rendre la machine incapable de les déchiffrer.
Sauf qu’à force de se tromper et d’apprendre de leurs erreurs, les robots parvenaient peu à peu à décoder la suite de mots et ainsi réussir à se faire passer pour des humains. Du coup, la seule solution semblait être de complexifier (en vain) un chiffrement qui nous a tous agacés au moins une fois dans notre vie. En effet qui n’a jamais vécu cette situation :
“Je n’arrive pas à déchiffrer je demande un nouveau code à lire… celui-là aussi est illisible… bon celui-là ça va sauf la fin, je tente … c’est un “m” ou un “n” imbriqué dans le “p” ? et ça c’est “th” ou bln ?! bon je tente… loupé … ok j’arrête… “
Selon une étude de Google « l’Intelligence Artificielle aujourd’hui [peut] résoudre même la variante la plus compliquée de texte déformé avec une exactitude de 99,8 % ». Pour remédier à ce problème, un nouveau format de Captcha a fait son apparition en 2014 : le reCAPTCHA. Ainsi demande-t-on désormais à l’internaute de cocher une simple case pour s’authentifier en tant qu’être humain. Le logiciel fera le tri entre un clic humain et non-humain selon le temps de réaction, le mouvement de la souris et le nombre d’essais avant de parvenir à compléter la tâche demandée.
Si un doute persiste un autre test sera alors demandé. Il s’agit de distinguer dans une liste de photographies, les thèmes demandés.
La demande peut paraître facile mais elle demande pourtant une capacité d’analyse que de nombreuses intelligence artificielles ne possèdent pas … encore. En fait, comme pour se tirer une balle dans le pied, Google profite des millions de réponses quotidiennes à ces tests justement pour améliorer le programme de reconnaissance d’images de ses IA. Quand les progrès seront suffisants, Google n’aura qu’à sortir un autre test simple pour un humain mais compliqué à résoudre pour une machine, et ainsi de suite. Les CAPTCHA participent donc aussi des projets de machine-learning des plus grandes boites digitales du monde et ce, en vous utilisant, ou du moins en utilisant les quelques secondes de votre vie passées à déchiffrer les CAPTCHA.
Souriez, vous aidez la science chaque jour pour rendre les robots aussi intelligents que vous !
L’étude à ne pas manquer :
Retrouvez cet article dans une page dédiée à cette adresse.
L’Appli de la semaine :
Tu as des amis ? Tu les rejoins souvent en ville ? Tu perds toujours du temps à leur demander par sms ou messenger où ils sont exactement ? Tu as un smartphone Android ou un iPhone ? Alors n’hésite pas à utiliser l’application de la semaine : Wesh.
Avec cette appli, tu gagnes du temps à rejoindre tes amis. En un clic ta position exacte est donnée et on te propose 3 messages prédéfinis : “Tu viens ? “ “J’arrive !” et “J’peux pas” auxquels tu peux même rajouter une photo pour être encore plus clair.
C’est simple, rapide et précis. Bref, à Toile de Fond on apprécie.
Le terme de communication/marketing digital de la semaine :
Le terme de la semaine de cette revue de presse est API.
API pour Application Programmable Interface (ou Interface de programmation en français) est un ensemble de fonctions permettant d’accéder aux services d’une application par l’intermédiaire d’un langage de programmation.
C’est toujours flou ? Concrètement, pensez à la conduite d’une voiture. Le conducteur n’a pas à connaître le fonctionnement mécanique du moteur d’un véhicule pour pouvoir le conduire. Seule lui est accessible une interface composée d’un volant, de pédales, d’une boîte de vitesse, et d’autres boutons utiles (oui je n’ai toujours pas le permis, ça se ressent). Il s’agit donc en quelque sorte d’une interface utilisateur permettant d’utiliser l’ensemble du produit.
Des API sur Internet il en existe des centaines. Une des plus connues est sans doute Facebook connect :
L’API que les webmasters rajoutent dans le code de leur site permet à l’utilisateur de se créer un compte rapidement et facilement en passant par l’intermédiaire d’un service où il possède déjà un compte. Si l’intérêt pour l’internaute est compréhensible, cela permet aussi pour le site web en question de récupérer lui aussi une mine d’informations sur le nouveau compte créé sans même avoir à les lui demander. Surtout, il peut se permettre d’avoir des informations à priori fiables (âge, sexe, adresse email, voire même profession si cela est notifié dans le profil) afin de se créer une solide base de données qui lui serviront pour prospecter.
D’autres API sont très connues, nous-mêmes sur Toile de Fond en utilisons car elles permettent souvent de développer notre notoriété sur les réseaux sociaux sans même avoir besoin d’agir.
C’est tout pour cette revue de presse du monde digitale. A la semaine prochaine et surtout d’ici là restez connectés !
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